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L'IDÉE DE LOI 241

et traduire les nuances du sentiment. Le vers d'airain de Corneille et de Victor Hugo, le vers ductile de Racine et de Lamartine, le vers de marbre de Leconte de l'Isle, le vers diapré de Maria de Hérédia, voilà certes une forme verbale assouplie à toutes les inspirations et chargée de ressources plastiques et musicales. Ne la livrons pas au chaos des fantaisies individuelles. — D'ail- leurs les lois de la phonétique sont aussi impres- criptibles que les leçons de l'histoire. Le vers doit être régulier, car cette régularité même assure à l'oreille le double appui dont elle a besoin pour distinguer le vers de la prose : un effet de sur- prise et un élément de sécurité. Si le vers n'a rien qui le fixe, il devient une matière indéfini- ment distendue, et ce vers et la prose seront indis- cernables. Ensuite un vers, pour être senti, doit être perçu entièrement par l'oreille. Or, notre mémoire auditive n'est pas sans limite. Le vers alexandrin a été parachevé à travers les âges, parce qu'il répond excellemment aux exigences de nos organes. Nous obéissons aux lois de la nature : il faut, de même, se plier à « la décision instinctive de l'ouïe ». Puisque les vers de li, 1$ et H> pieds ne paraissent pas répondre aux condi-

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