LE BONHEUR ET LE DESTIN DES HOMMES 219
Le Bonheur s'achève sur une pensée dont la hardiesse est d'autant plus émouvante qu'elle surgit, comme un aveu invincible, du déroule- ment même des faits. C'est la manière des grands sincères. Sully Prudhomme est de ceux qui n'éta- lent pas leur audace.
Quand Faustus et Stella abandonnent la région où le bonheur est trop lourd du poids des soli- tudes, ils trouvent la terre envahie par les forces de la nature. L'humanité est morte sous l'usure du luxe et du rêve :
L'homme on a disparu. Le céleste silonce
Que son verbe sublime y rompait autrefois
N'est maintenant troublé que par d'inertes voix,
Parle bruit sourd du venl dans 1rs bois qu'il balance...
La vie a déserté, d'âge en âge pins brève,
Son corps pins affaibli par le luxe et le rêve;
Par sa victoire même il a péri vaincu.
Je ne connais pas de condamnation plus déci- sive sur la banqueroute de l'œuvre humaine : c'est une conclusion révolutionnaire qui sort de cette œuvre d'apparence si romanesque. Le poète semble nous dire : l'humanité s'est épuisée elle- même. Fille a mal dirigé ses forces. Llle va se