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I

L'AMOUR ET LA DOCTRINE DE L'ASPIRATION 1G3

comprimant son charme qui fut si doux aux âme* timides, veut lenter une œuvre dure et triste où s'inscrira son plus haut dessein. Aux lamentations de sa Muse, il répond avec courage :

Oh! De dédaigne pas le service à me rendre! Si lu n'es plus réponse, ao moins reste la soeurl

L'ordre mén si un rythme, et, pour le bien comprendre,

l'u bercement sublime est utile au penseur.

Courage! la pensée esl généreuse el >ùiv, Elle te soutiendra. Mais adieu ta chanson! Que l'archet seulement me batte la mesure, si le luth à ma voix refuse l'unisson.

(La Justice. Prologue.)

Dans ces vers l'image est rare et ne satisfait pas les amants des mots somptueux et sonores, mais la pensée a une ferveur singulière et l'accent qui l'accompagne a une noblesse émouvante. Soyons dignes de comprendre que la poésie réside moins dans la qualité des mots que dans la force de l'accent; car les mots se cherchent, se raturent, se remplacent et se trouvent, mais l'accent est L'âme même de notre âme. C'est pourquoi à tra- vers ces mots simples et forts, nous sentons déjà le tragique de ce drame qui se déroulera, à tra- vers les dix veilles du poème, entre la pensée et le cœur de Sully Prudhomme. Dans ces vers nus et fermes où passe en frisson l'aveu d'un amour