Page:Zyromski - Sully Prudhomme, 1907.djvu/166

Cette page n’a pas encore été corrigée

152 SULLY PRUDHOMME

Mais, peu à peu, la mélancolie du regret s'atté- nue, et une tendresse infinie, douce comme le repos qui suit l'orage, emplit le cœur du "poète qui se hausse enfin à la passion glorieuse chantée par Dante :

Je l'aime sans désir comme on aime une étoile Avec le sentiment qu'elle est à l'infini.

Plus tard, dans le Bonheur, il exprimera toute la sensibilité du Pétrarquisme, en chantant la noblesse du renoncement dans l'ardeur de l'amour qui demeure invincible :

Vous connaissez l'amour, mais non sa joie entière : La profonde douceur, la jouissance altière De rendre sur la terre un culte à la vertu, De pouvoir s'adorer quand le désir s'est tu.

Suivons le poète dans cette ascension sur les sommets de la Passion. Cette conception de l'amour sera fortifiée par l'admiration apportée par la Beauté de l'Art. Dans un sonnet des Épreuves il écrit ce vers qui renferme une esthé- tique de l'amour :

Beauté qui rends pareils à des temples les corps!

Ainsi la Beauté éloigne le désir; la Vénus de Milo est belle, mais son harmonie excite en nous