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de la plastique, mais de la psychologie. Aussi voyons-nous déjà Verhaeren jeté hors de la plastique. Une dernière fois, il s’essaie à dresser de sombres statues de moines ; mais, animées de la vie intérieure, elles n’ont plus l’impassibilité du marbre, et s’érigent en symboles de la façon, propre à chacun de ces moines, de servir Dieu. Dans ses moines, Verhaeren développe les différents caractères qui, même sous l’habit monacal, ne cessent pas de se manifester. Ainsi nous dépeint-il les multiples formes de la religiosité : le moine féodal, fils d’une noblesse ancienne, veut conquérir Dieu comme jadis ses pères ont conquis leurs châteaux et leurs forêts, par l’éperon et par le glaive ; le « moine flambeau », ardent et passionné, le veut posséder comme une femme, avec sa passion ; le moine sauvage, qui sort des forêts et ne comprend Dieu qu’à la façon d’un païen, ne sait que craindre le créateur de l’éclair et du tonnerre ; pendant que le moine doux, pareil à un troubadour qui aime timidement et tendrement la mère de Dieu, auprès d’elle se réfugie dans la crainte de ce Dieu. L’un veut atteindre la divinité par les livres et par les preuves ; l’autre ne la peut comprendre, son intelligence est incapable de la saisir, mais il la