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Voilà un cri qui traduit, en termes inoubliables, l’extase dernière de la vitalité : le sentiment vital ici est synonyme de volupté suprême.

Une fois de plus, comme dans bien d’autres parties de l’œuvre du poète, le cercle se ferme ; le terme de la connaissance revient à son point de départ ; nous retrouvons un sentiment inné, instinctif, parvenu à un état de conscience parfaite. Le premier et le dernier ouvrage de Verhaeren, les Flamandes comme les Rythmes souverains, chantent la force de la vie. Mais dans le premier la vie apparaît, sous sa forme sensible, comme un plaisir physique inconscient : dans le dernier, se révèle un sentiment vital raisonné qui parvient à son épanouissement complet.

Toute l’évolution de Verhaeren — qui s’accorde, sur ce point, avec les grands poètes allemands, avec Nietzsche et Dehmel — tend, non pas vers la limitation des instincts primordiaux, mais vers leur développement logique. Ses derniers livres ainsi que ses premiers ouvrages renferment des descriptions de son pays, mais son horizon s’est élargi au spectacle de l’univers. Ainsi le sentiment vital reparaît dans son œuvre comme le sens véritable de la vie : mais il s’est exalté de toutes les connaissances acquises, de