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dans cette pièce, la tragédie de la femme qui souffre effroyablement d’être sans cesse convoitée, qui se consume de douleur d’être toujours ravie, d’ignorer un seul regard pur, un seul entretien paisible, un instant même de répit, condamnée qu’elle est au perpétuel bûcher de la passion, environnée toujours des flambantes ardeurs masculines. Nul ne la peut regarder sans désir. On l’emporte et personne ne se demande si elle est consentante. Dérobée ainsi qu’une chose, elle passe de main en main. Chez Verhaeren, c’est l’Hélène revenue dans sa patrie, lasse de toute agitation, de tout succès, lasse de l’amour. C’est la femme qui hait dans sa propre beauté la source de ses tribulations. Elle aspire ardemment à voir venir l’âge où nul ne la convoitera désormais, où elle pourra couler enfin des jours tranquilles. Ménélas l’a ramenée à son foyer, l’a arrachée à toutes les fumées de la passion et du crime. Elle ne veut plus qu’être paisible, vivre des jours silencieux et lui demeurer fidèle : elle ne veut plus rien. Il n’est plus de passion qui la puisse à présent séduire ; elle, qui vit tant de flammes, ne désire plus que le foyer et la lampe, et c’est là sa résignation la plus poignante. Mais le destin ne saurait se