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revêtissent un sens obscur qui les rendit presque incompréhensibles. Verlaine donnait à sa poésie la légèreté fluide et simple d’une musique inconnue. Gustave Kahn et Jules Laforgue, les premiers, abandonnèrent la rime et l’alexandrin au profit d’un vers libre à l’irrégulière ordonnance. Chacun s’efforçait pour son propre compte de trouver du nouveau, et tous se retrouvaient en communauté d’ardeur pour attaquer les idoles d’un lyrisme démodé et pour désirer fougueusement une nouvelle formule d’expression. Leur tort fut de tant surfaire l’importance d’une révolution dans la technique, de tant s’attacher à approfondir les théories, au lieu de chercher à développer leur propre personnalité. Aussi leurs talents se sont-ils très vite enlisés. Peu à peu leurs chemins ont bifurqué. Plusieurs ont sombré dans le journalisme. D’autres continuent à fouler toujours les traces de leur jeunesse et tournent encore dans le même cercle. Des Symbolistes et des Décadents il n’est rien resté, sinon un épisode de l’histoire littéraire. Ce n’est plus qu’une enseigne à demi effacée, mais depuis longtemps la boutique est vide. Verhaeren a compté parmi les Symbolistes. Toutefois nous ne pensons pas que cette école ait