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plus en lui un lyrisme délicat et subtil : il s’en dégageait comme un conseil, comme une exhortation. Plus l’univers se révèle à nous dans toute l’ampleur de ses vastes horizons, dans le jeu magnifique de ses forces, dans son héroïsme tel que le définissait Emerson — c’est-à-dire dans la concentration de sa puissance — plus aussi le lyrisme doit s’effacer devant le pathétique, dans le sens nouveau qu’il faut donner à ce terme et tel peut-être que Verhaeren l’a conçu. À des impressions formidables ne peuvent correspondre des expressions mesquines, des formes indécises : un cri sonore appelle une réponse également vibrante. Tout art est, encore plus que nous ne le soupçonnons, un produit du temps où il est éclos. Et de même, dans chaque art, il existe des rapports mystérieux entre les besoins d’une époque et les formules esthétiques : ces rapports échappent à l’analyse ; ils ne se révèlent à nous, de temps à autre, que par des manifestations éphémères et des intuitions fugitives.