Page:Zweig - Émile Verhaeren, sa vie, son œuvre.djvu/162

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Par delà les frontières, sur de larges fondations, une race unique se constitue, une communauté nouvelle s’établit : race et communauté européennes. Le désir et la réalité arrivent maintenant à se joindre. Verhaeren voit l’Europe unie par les liens d’une solide et collective énergie. Pour lui, l’Europe est le seul pays qui ait enfin pris conscience de lui-même. Dans un lointain de rêve les autres continents continuent de mener une vie végétative ; l’Afrique et l’Inde sommeillent encore dans les ténèbres des temps primitifs. Mais l’Europe est la « forge où se frappe l’idée[1] », où toutes les diversités, toutes les observations individuelles, tous les résultats acquis semblent recréer une nouvelle intelligence et éveiller la conscience européenne. Intérieurement le progrès n’est pas encore accompli : les peuples sont toujours ennemis, ils ignorent qu’ils soient en communauté. Mais déjà « le monde entier est repensé par leurs cervelles[2] ». Déjà ils travaillent à la transvaluation dans le sens européen de toute connaissance sensible. Bientôt l’Européen, riche du passé, fort du sen-

  1. « La Conquête » (la Multiple Splendeur).
  2. « La Conquête » (les Forces tumultueuses).