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elle sans discernement toutes les forces de l’univers qui l’environne. Vers elle, les forces affluent de tous les côtés. Tous les chemins se rythment vers elle. Ce n’est pas la seule énergie des hommes qu’elle attire, toute la mer semble aussi se précipiter en ses ports. « Toute la mer va vers la ville[1]. » Tous les flots semblent uniquement faits pour y amener, comme une forêt en marche, les navires. Elle absorbe toutes choses, les transforme dans « la noire immensité des usines rectangulaires[2] » et, avec ce qu’elle a dévoré, semble vomir de l’or.

Ce monstrueux combat social entre les campagnes et la ville a une plus haute signification. Il n’est que le symbole momentané d’un conflit éternel. La campagne représente essentiellement le conservatisme. Les modalités de travail y sont comme pétrifiées dans le calme de la régularité. La vie sans précipitation n’y connaît d’autres règles que le changement des saisons. Comme les formes, toutes les impressions y sont pures et simples. Les hommes y sont plus directement soumis aux fatalités naturelles : la foudre, la grêle peuvent anéantir leur

  1. « Le Port » (les Villes tentaculaires).
  2. « La Plaine » (idem).