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ce fut très simple, très fraternel et très joyeux. Les autorités, Martineau avec son écharpe, en tête du conseil municipal, prirent possession de ce Palais du peuple, au nom de la commune qu’elles représentaient. Puis les enfants des écoles jouèrent, chantèrent, ouvrirent l’avenir de bon travail et de paix heureuse, de leurs mains innocentes encore, saines et pures, au milieu de grands rires. C’était l’éternelle jeunesse, c’était l’enfant qui vaincrait les derniers obstacles vers la future cité de solidarité parfaite ! Ce que l’enfant d’aujourd’hui n’aurait pu faire, l’enfant de demain le ferait. Et, lorsque les enfants eurent jeté leur cri d’espoir, les jeunes garçons et les jeunes filles vinrent avec la tendre promesse des fécondités prochaines. Ensuite, on vit la maturité, la pleine moisson, les époux et les pères, les épouses et les mères, tout le flot humain en grand travail, derrière lequel il ne restait que les vieillards, le souvenir attendri, l’heureux soir de l’existence, quand l’existence a été vécue loyalement. L’humanité reprenait conscience d’elle, et mettait l’ancien idéal divin dans la règle de la vie terrestre, faite de raison, de vérité et de justice, pour la fraternité, la paix et le bonheur des hommes. Désormais, Jonville aurait comme lieu de réunion cette maison fraternelle de joie et de santé, où il n’y aurait ni menaces, ni châtiments, où le soleil entrerait égayer tous les âges. On n’y troublerait pas les cœurs et les intelligences, on n’y vendrait pas les parts d’un paradis menteur. Il n’en sortirait que des citoyens ragaillardis, heureux de vivre la vie pour l’allégresse de la vie elle-même. Et toute l’absurdité cruelle des dogmes croulait devant cette simple gaieté et cette lumière bienfaisante.

Les danses se prolongèrent jusqu’au soir. Les belles paysannes du village ne s’étaient jamais trouvées à pareille fête. On remarqua beaucoup le visage riant de la mairesse, la belle Mme Martineau, qui était restée une