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toi me conseillera… Oui, oui, il n’y a que la bonté, il n’y a que l’amour, c’est la vérité unique.

Et, comme Mme Berthereau, épuisée, la face illuminée d’un divin sourire, serrait sa fille contre sa poitrine, Mme Duparque eut un dernier geste menaçant. Le crépuscule était complètement venu, la chambre ne se trouvait plus éclairée que par la faible lueur du grand ciel pur, semé des premières étoiles ; tandis que la fenêtre ouverte laissait monter le profond silence de la petite place déserte, où sonnait seul le rire d’un enfant. Et, dans cet apaisement des choses, traversé de l’auguste souffle de la mort prochaine, l’aïeule têtue, aveugle et sourde, dit encore :

— Vous n’êtes plus de moi, ni fille, ni petite-fille, ni arrière-petite-fille. L’une poussant l’autre, vous vous acheminez à la damnation éternelle. Allez, allez ! Dieu vous renie, et je vous renie !

Puis, elle partit, elle referma rudement la porte. Dans la douce pièce obscure, il ne restait que la mère agonisante, entre sa fille et sa petite-fille, réunies en une seule étreinte. Et, longuement, toutes trois pleurèrent des larmes où beaucoup de délices se mêlaient à beaucoup de douleur.

Deux jours plus tard, Mme Berthereau mourut très catholiquement, après avoir reçu l’extrême-onction, comme elle l’avait désiré. À l’Église, on remarqua l’attitude sévère de Mme Duparque, toute noire, en grand deuil. Louise seule l’accompagnait, Geneviève avait dû reprendre le lit, à la suite d’une telle secousse nerveuse, qu’elle semblait ne plus voir et ne plus entendre. Pendant trois jours encore, elle demeura ainsi, couchée, le visage tourné vers le mur, ne voulant répondre à personne, pas même à sa fille. Elle devait souffrir affreusement, des soupirs lui échappaient, des crises de larmes