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était excédé, enfiévré, malade. Comme terrain politique, elle était devenue exécrable, et la République resterait certainement sur le carreau, aux élections prochaines, si l’on donnait à la réaction cléricale l’occasion de l’exploiter encore. Les élections prochaines ! il avait tout dit, c’était de nouveau le grand argument, le mot d’ordre allait être d’enterrer l’iniquité suprême sous plus de silence qu’au lendemain du premier procès. Les députés, les sénateurs, le préfet Hennebise, toute l’administration, tous les corps constitués, sans avoir besoin d’en faire le complot, tous tombaient à un aplatissement total, à un silence absolu, dans leur inquiétude de l’innocent condamné deux fois, dont on ne devait même plus prononcer le nom, par épouvante du fantôme qu’il évoquait. Et d’anciens républicains, d’anciens voltairiens, comme Lemarrois, achevaient leur revirement, se rapprochaient de l’Église, croyaient avoir besoin d’elle, pour tenir tête au socialisme montant, leur terreur de demain, qui menaçait de déloger la bourgeoisie possédante de sa longue usurpation. Certainement, Lemarrois n’avait pas été fâché de voir Delbos, son adversaire aux élections, dont les voix socialistes augmentaient à chaque scrutin, battu à Rozan, atteint lui-même de la foudre ; et son besoin lâche de silence venait beaucoup de son désir de laisser se noyer les héros compromis. Au milieu d’une telle débâcle des consciences et des caractères, Marcilly seul gardait son sourire aimable, très à l’aise, ayant déjà eu le portefeuille de l’Instruction publique dans un ministère radical, certain de le retrouver un jour ou l’autre dans un ministère modéré, tellement convaincu de la force irrésistible de sa souplesse et de ses poignées de main à tous, qu’il fut l’unique à bien accueillir Marc et à lui faire tout espérer, s’il remontait au pouvoir, sans d’ailleurs lui rien promettre formellement.

La congrégation dès lors exulta, dans l’insolence de son