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même, le traitait en coupable condamné déjà, comme enhardi par l’attitude de cet accusé d’un calme si spécial, écoutant les témoins avec la curiosité stupéfaite d’un homme auquel on raconte l’extraordinaire aventure d’un autre. À deux ou trois reprises seulement, il faillit s’emporter contre des témoignages par trop mensongers ; et, le plus souvent, il se contentait de sourire, de hausser les épaules. Enfin, le procureur de la République Pacart prit la parole. Grand et maigre, avec de longs gestes cassés, il affectait une éloquence sans ornements, d’une précision mathématique. Sa tâche n’était point commode, devant l’arrêt si net de la Cour de cassation. Mais sa tactique fut très simple, il n’en tint nul compte, il ne fit pas une fois allusion à la longue enquête qui avait abouti au renvoi de l’affaire devant une nouvelle cour d’assises. Tranquillement, il reprit l’ancien acte d’accusation, il s’appuya sur le rapport des deux experts, il conclut à la culpabilité, en acceptant la nouvelle version aggravée du modèle d’écriture, autrefois paraphé simplement d’un faux, timbré maintenant d’un cachet faux. Il se permit même, à propos de ce cachet, des phrases singulières, des affirmations absolues, comme s’il avait eu des preuves certaines de son emploi, sans pouvoir les donner. Quant au frère Gorgias, ce n’était pour lui qu’un malheureux, peut-être un malade, à coup sûr un besogneux et un passionné, vendu aujourd’hui aux juifs, sorti de l’Église dont il avait toujours été un enfant terrible et compromettant. Et il termina en demandant aux jurés d’en finir avec cette affaire si désastreuse à la paix morale du pays, de dire une fois de plus où était le coupable, parmi les anarchistes, les cosmopolites acharnés à la destruction de l’idée de Dieu et de patrie, ou parmi les hommes de foi, de respect et de tradition, qui avaient fait depuis des siècles la grandeur de la France.

Ensuite, Delbos parla pendant deux audiences. Lui,