Page:Zola - Vérité.djvu/424

Cette page n’a pas encore été corrigée


Et, s’arrêtant tout d’un coup devant elle, il continua d’une voix rude :

— On t’a donc gâté l’esprit et le cœur, à toi aussi, pour que tu ne m’aimes plus ?… N’est-ce pas ? à chacune de tes visites, on recommence mon procès, on te répète des infamies, afin de te détacher de moi. Il s’agit, n’est-ce pas ? de t’arracher à l’influence du maudit, du damné, et de te rendre aux bons amis de ces dames, qui feront de toi une hypocrite et une démente… Et ce sont mes ennemis que tu écoutes, et c’est à leurs obsessions continuelles que tu vas obéir, en m’abandonnant !

Désespérée, elle leva vers lui des mains suppliantes, les yeux en larmes.

— Mon papa, mon papa, calme-toi… Je t’assure, tu te trompes, maman n’a jamais laissé dire devant moi des choses trop vilaines sur ton compte. Sans doute, grand-mère ne t’aime pas, et elle ferait mieux de se taire souvent, quand je suis présente. Je mentirais, si je disais qu’elle ne fait pas tout son possible pour que j’aille rejoindre maman et habiter chez elle. Mais, je te le jure, ni elle ni les autres ne sont pour rien dans ma détermination… Tu le sais bien, je ne mens jamais. C’est moi, moi seule, qui ai réfléchi et qui ai songé à notre séparation, comme à une chose bonne et sage.

— Une chose bonne, ton départ ! J’en mourrai.

— Non, tu comprendras, et tu es si brave !… Assieds-toi, écoute-moi.

Elle le força doucement à se rasseoir devant elle. Dans ses deux mains caressantes, elle lui avait pris les mains, et elle le raisonnait, en petite personne très avisée.

— Chez grand-mère, tout le monde est convaincu que c’est uniquement toi qui me détournes de la religion. Tu pèses sur moi, tu me brutalises pour m’imposer tes idées, et si je t’échappais, je me confesserais demain, je ferais