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perdue, comme jamais il ne l’avait sentie, quand elle rentrait de ses anciennes visites à l’abbé Quandieu. Elle nouait certainement là quelque passion mystique, elle trouvait un aliment nouveau à son besoin d’aimer, qui remplaçait pour un temps les caresses conjugales, grâce à la crise de trouble étrange où la jetait sa grossesse.

Peut-être aussi le moine agissait-il contre cette fécondité, agenouillée si près de lui, la terrorisant avec l’enfant du damné qu’elle portait. À plusieurs reprises, elle parla désespérément du pauvre petit être qui allait naître, prise d’une sorte de terreur, ainsi qu’il arrive à certaines mères hantées de la crainte d’accoucher d’un monstre. Et, s’il naissait normal, comment le protégerait-elle du péché environnant, où l’emporterait-elle, afin de le soustraire à la demeure sacrilège de son père ? Cela faisait un peu de lumière sur la rupture d’alcôve exigée par elle, sans doute le remords d’avoir enfanté d’un incroyant, le serment de ne plus enfanter jamais, l’amour perverti, exaspéré, rêvant de se satisfaire désormais dans l’au-delà du désir. Et pourtant que d’obscurité encore, et quelle souffrance était celle de Marc de ne pas comprendre, de sentir à chaque heure lui échapper cette femme adorée, que l’Église lui reprenait pour l’anéantir, lui et son œuvre de libération humaine, en le torturant !

Ce fut au retour d’un de ses longs entretiens avec le père Théodose que Geneviève, l’air exalté et brisé à la fois, dit à Louise, qui rentrait de l’école :

— Demain, tu iras te confesser chez les capucins, à cinq heures. Si tu ne te confessais pas, on ne te recevrait plus au catéchisme.

Résolument, Marc intervint. Il avait laissé Louise suivre le catéchisme. Mais, jusque-là, il s’était opposé à ce qu’elle se confessât.

— Louise n’ira pas chez les capucins, dit-il avec fermeté.