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ses jours de confessionnal, mais encore il lui faisait l’honneur de la visiter place des Capucins, lorsqu’un accès de goutte la clouait sur un fauteuil. Il se rencontrait là avec des personnages discrets, un choix de prêtres et de religieux, l’abbé Quandieu, le père Théodose, le frère Fulgence, heureux de ce coin dévot d’ombre et de silence de cette petite maison fermée, où leurs conciliabules passaient inaperçus. Des rumeurs couraient bien, on disait que la faction cléricale avait là son siège secret, l’officine cachée, de laquelle partaient les graves résolutions prises en commun. Mais comment soupçonner cette si modeste demeure des deux vieilles dames, qui avaient certes le droit de recevoir chez elles des amis, dont on voyait à peine se glisser les ombres ? Pélagie, la servante, refermait la porte doucement, aucun visage ne paraissait aux fenêtres, pas un souffle ne sortait de l’étroite façade endormie. Et cela était très digne, une grande déférence entourait ce logis respectable.

Alors, Marc regretta de n’être pas allé plus souvent chez ces dames. Sa grande faute n’était-elle pas de leur avoir abandonné Geneviève, pendant les longues journées qu’elle passait près d’elles, avec la petite Louise ? Sa seule présence aurait combattu la contagion du milieu, on se serait contenu devant lui, dans la sourde attaque qu’il sentait dirigée contre ses idées et sa personne. Geneviève, comme si elle avait eu encore conscience du danger dont on menaçait la paix de son ménage, résistait parfois, luttait pour ne pas entrer en guerre avec son mari, qu’elle aimait toujours. C’était ainsi que le jour où elle s’était remise à pratiquer, elle avait voulu pour confesseur l’abbé Quandieu, au lieu du père Théodose, dont Mme Duparque cherchait à lui imposer la direction. Elle sentait bien l’âpreté belliqueuse du capucin, sous la beauté arrangée de la grande barbe noire, de l’admirable visage aux yeux de flamme, qui faisaient rêver