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et Marc revint à Maillebois, où l’attendait la plus féroce des luttes, une véritable guerre au couteau.

Le pis était que la situation politique, s’y aggravait, comme à Beaumont. Les dernières élections municipales, à la suite des élections législatives, avaient, elles aussi, donné des résultats désastreux. Darras, dans le nouveau conseil municipal, s’était trouvé en minorité, et Philis, le conseiller clérical, le soutien de la réaction, venait d’être élu maire. Aussi Marc voulut-il avant tout voir Darras, pour savoir jusqu’à quel point celui-ci pourrait le soutenir encore. Il le visita un soir, dans le salon confortable de la belle maison que l’entrepreneur enrichi s’était construite. Tout de suite, ce dernier, en l’apercevant, leva les bras au ciel.

— Eh bien mon cher instituteur, voilà la meute lâchée sur vos talons Et je vais être avec vous, comptez sur moi, maintenant que je suis battu, réduit à un rôle d’opposition… Quand j’étais maire, il m’était bien difficile de vous donner raison toujours ; car, vous le savez, je n’avais guère qu’une majorité de deux voix, je me trouvais souvent dans l’impossibilité d’agir. Souvent, je vous ai contrecarré, tout en vous donnant mille fois raison au fond… Mais, à cette heure, nous allons marcher, puisque je n’ai plus qu’à me battre, pour tâcher de démolir le Philis et lui reprendre la mairie. Vous avez bien fait de décrocher ce bon Dieu du mur, où il n’était pas autrefois, du temps de Simon, et où il n’aurait jamais dû être.

Marc se permit de sourire.

— Toutes les fois que je vous ai parlé de l’enlever, vous avez jeté les hauts cris en prétextant des nécessités de prudence, la crainte d’effrayer les parents, de donner une arme à nos adversaires.

— Mais puisque je vous confesse l’embarras où j’étais ! Allez,