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ce dont il était convenu qu’on ne parlerait jamais chez elle, lui échappa, en un flot de terrible colère.

— Allons, dites tout, avouez, vous ne venez ici que pour vous occuper sur place de cette abominable affaire Simon. Oui, vous êtes avec ces ignobles juifs, vous rêvez de remuer encore cette ordure, de trouver quelque innocent, pour l’envoyer là-bas, au bagne, à la place de votre immonde assassin, si justement condamné. Et cet innocent, n’est-ce pas ? vous vous entêtez à le chercher parmi les plus dignes des serviteurs de Dieu… Avouez, avouez donc !

Marc ne put s’empêcher de sourire ; car, il le sentait bien, il n’y avait, au fond des colères dont on le poursuivait, que l’affaire Simon, la terreur de la lui voir reprendre, de le voir atteindre enfin le véritable coupable. Derrière Mme Duparque, il devinait son directeur, le père Crabot ; et tout l’effort pour l’empêcher de mener campagne à Maillebois, venait de là, de la volonté bien arrêtée de n’y plus tolérer un instituteur qui ne serait pas dans les mains de la congrégation.

— Mais certainement, répondit-il de son air paisible, je suis toujours convaincu de l’innocence de mon camarade Simon, et je ferai tout au monde pour la faire éclater.

Mme Duparque se tourna violemment vers Mme Berthereau, puis vers Geneviève.

— Vous entendez, et vous ne dites rien ! Notre nom va être mêlé à cette campagne d’ignominie. On verra notre fille dans le camp des ennemis de la société et de la religion… Voyons, voyons ! toi qui es sa mère, dis-lui donc que c’est impossible, qu’elle doit empêcher cette infamie, pour son honneur, pour le nôtre à tous !

Elle s’adressait à Mme Berthereau, dont les mains tremblantes venaient de laisser échapper la broderie, dans son effarement d’une telle querelle. Elle resta un instant muette,