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NANA

ce sourire vague qui montrait un peu de la blancheur de ses dents. Et, comme le comte passait, elle le questionna.

— Que complotez-vous donc, monsieur de Vandeuvres ?

— Moi, madame ? répondit-il tranquillement, je ne complote rien.

— Ah !… Je vous voyais si affairé… Tenez, vous allez vous rendre utile.

Elle lui mit dans les mains un album, en le priant de le porter sur le piano. Mais il trouva moyen d’apprendre tout bas à Fauchery qu’on aurait Tatan Néné, la plus belle gorge de l’hiver, et Maria Blond, celle qui venait de débuter aux Folies-Dramatiques. Cependant, la Faloise l’arrêtait à chaque pas, attendant une invitation. Il finit par s’offrir. Vandeuvres l’engagea tout de suite ; seulement, il lui fit promettre d’amener Clarisse ; et comme la Faloise affectait de montrer des scrupules, il le tranquillisa en disant :

— Puisque je vous invite ! Ça suffit.

La Faloise aurait pourtant bien voulu savoir le nom de la femme. Mais la comtesse avait rappelé Vandeuvres, qu’elle interrogeait sur la façon dont les Anglais faisaient le thé. Il se rendait souvent en Angleterre, où ses chevaux couraient. Selon lui, les Russes seuls savaient faire le thé ; et il indiqua leur recette. Puis, comme s’il eût continué tout un travail intérieur pendant qu’il parlait, il s’interrompit pour demander :

— À propos, et le marquis ? Est-ce que nous ne devions pas le voir ?

— Mais si, mon père m’avait promis formellement, répondit la comtesse. Je commence à être inquiète… Ses travaux l’auront retenu.