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NANA

lui apportait une quarantaine de mille francs. Cela ne fit qu’augmenter sa mauvaise humeur, car elle aurait dû gagner un million. Labordette, qui faisait l’innocent dans toute cette aventure, abandonnait carrément Vandeuvres. Ces anciennes familles étaient vidées, elles finissaient d’une façon bête.

— Eh ! non, dit Nana, ce n’est pas bête, de s’allumer comme ça, dans une écurie. Moi je trouve qu’il a fini crânement.. Oh ! tu sais, je ne défends pas son histoire avec Maréchal. C’est imbécile. Quand je pense que Blanche a eu le toupet de vouloir me mettre ça sur le dos ! J’ai répondu : « Est-ce que je lui ai dit de voler ! » N’est-ce pas ? On peut demander de l’argent à un homme, sans le pousser au crime… S’il m’avait dit : « Je n’ai plus rien, » je lui aurais dit : « C’est bon, quittons-nous. » Et ça ne serait pas allé plus loin.

— Sans doute, dit la tante gravement. Lorsque les hommes s’obstinent, tant pis pour eux !

— Mais quant à la petite fête de la fin, oh ! très chic ! reprit Nana. Il paraît que ç’a été terrible, à vous donner la chair de poule. Il avait écarté tout le monde, il s’était enfermé là-dedans, avec du pétrole… Et ça brûlait, fallait voir ! Pensez donc, une grande machine presque toute en bois, pleine de paille et de foin !… Les flammes montaient comme des tours… Le plus beau, c’étaient les chevaux qui ne voulaient pas rôtir. On les entendait qui ruaient, qui se jetaient dans les portes, qui poussaient de vrais cris de personne… Oui, des gens en ont gardé la petite mort sur la peau.

Labordette laissa échapper un léger souffle d’incrédulité. Lui, ne croyait pas à la mort de Vandeuvres. Quelqu’un jurait l’avoir vu se sauver par une fenêtre. Il avait allumé son écurie, dans un détraquement de