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NANA

une poignée de diamants jetée sur un brasier, un soir d’ivresse, pour voir si ça brûlait comme du charbon. Peu à peu, avec ses gros membres, ses rires canailles de faubourienne, elle s’était imposée à ce fils, si appauvri et si fin, d’une antique race. À cette heure, il risquait tout, si envahi par son goût du bête et du sale, qu’il avait perdu jusqu’à la force de son scepticisme. Huit jours auparavant, elle s’était fait promettre un château sur la côte normande, entre le Havre et Trouville ; et il mettait son dernier honneur à tenir parole. Seulement, elle l’agaçait, il l’aurait battue, tant il la sentait stupide.

Le gardien les avait laissés entrer dans l’enceinte du pesage, n’osant arrêter cette femme au bras du comte. Nana, toute gonflée de poser enfin le pied sur cette terre défendue, s’étudiait, marchait avec lenteur, devant les dames assises au pied des tribunes. C’était, sur dix rangées de chaises, une masse profonde de toilettes, mêlant leurs couleurs vives dans la gaieté du plein air ; des chaises s’écartaient, des cercles familiers se formaient au hasard des rencontres, comme sous un quinconce de jardin public, avec des enfants lâchés, courant d’un groupe à un autre ; et, plus haut, les tribunes étageaient leurs gradins chargés de foule, où les étoffes claires se fondaient dans l’ombre fine des charpentes. Nana dévisageait ces dames. Elle affecta de regarder fixement la comtesse Sabine. Puis, comme elle passait devant la tribune impériale, la vue de Muffat, debout près de l’impératrice, dans sa raideur officielle, l’égaya.

— Oh ! qu’il a l’air bête ! dit-elle très haut à Vandeuvres.

Elle voulait tout visiter. Ce bout de parc, avec ses pelouses, ses massifs d’arbres, ne lui semblait pas si drôle. Un glacier avait installé un grand buffet près