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LES ROUGON-MACQUART

Maloir se tordirent. Nana, loin de se fâcher, eut un rire attendri, en disant que non, malheureusement ; elle aurait bien voulu, pour le petit et pour elle ; mais il en viendrait peut-être un tout de même. Fontan, qui faisait le bonhomme, prit Louiset dans ses bras, jouant, zézayant.

— Ça n’empêche pas, on aime son petit père… Appelle-moi papa, crapule !

— Papa… papa…, bégayait l’enfant.

Tout le monde le couvrit de caresses. Bosc, embêté, parlait de se mettre à table ; il n’y avait que ça de sérieux. Nana demanda la permission d’asseoir Louiset près d’elle. Le dîner fut très gai. Bosc, pourtant, souffrit du voisinage de l’enfant, contre lequel il devait défendre son assiette. Madame Lerat le gêna aussi. Elle s’attendrissait, lui communiquait tout bas des choses mystérieuses, des histoires de messieurs très bien qui la poursuivaient encore ; et, à deux reprises, il dut écarter son genou, car elle l’envahissait, avec des yeux noyés. Prullière se conduisit comme un malhonnête à l’égard de madame Maloir, qu’il ne servit pas une fois. Il était occupé uniquement de Nana, l’air vexé de la voir avec Fontan. D’ailleurs, les tourtereaux finissaient par être ennuyeux, tant ils s’embrassaient. Contre toutes les règles, ils avaient voulu se placer l’un près de l’autre.

— Que diable ! mangez, vous avez bien le temps ! répétait Bosc, la bouche pleine. Attendez que nous ne soyons plus là.

Mais Nana ne pouvait se tenir. Elle était dans un ravissement d’amour, toute rose comme une vierge, avec des rires et des regards trempés de tendresse. Les yeux fixés sur Fontan, elle l’accablait de petits noms : mon chien, mon loup, mon chat ; et, lorsqu’il