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LES ROUGON-MACQUART

de Vandeuvres qui me promet depuis cinq ans ; cette année, il se décidera peut-être.

— Ah bien ! dit la comtesse en riant, si nous n’avons que monsieur de Vandeuvres ! Il est trop occupé.

— Et Philippe ? demanda Muffat.

— Philippe a demandé un congé, répondit la vieille dame, mais vous ne serez sans doute plus aux Fondettes, quand il arrivera.

On servait le café. La conversation était tombée sur Paris, et le nom de Steiner fut prononcé. Ce nom arracha un léger cri à madame Hugon.

— À propos, dit-elle, monsieur Steiner, c’est bien ce gros monsieur que j’ai rencontré un soir chez vous, un banquier, n’est-ce pas ?… En voilà un vilain homme ! Est-ce qu’il n’a pas acheté une propriété pour une actrice, à une heure d’ici, là-bas, derrière la Choue, du côté de Gumières ! Tout le pays est scandalisé… Saviez-vous cela, mon ami ?

— Pas du tout, répondit Muffat. Ah ! Steiner a acheté une campagne dans les environs !

Georges, en entendant sa mère aborder ce sujet, avait baissé le nez dans sa tasse ; mais il le releva et regarda le comte, étonné de sa réponse. Pourquoi mentait-il si carrément ? De son côté, le comte, ayant remarqué le mouvement du jeune homme, lui jeta un coup d’œil de défiance. Madame Hugon continuait à donner des détails : la campagne s’appelait la Mignotte ; il fallait remonter la Choue jusqu’à Gumières pour traverser sur un pont, ce qui allongeait le chemin de deux bons kilomètres ; autrement, on se mouillait les pieds et on risquait un plongeon.

— Et comment se nomme l’actrice ? demanda la comtesse.