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Félicie était toute glacée.

— Assieds-toi et causons, dit-elle. Ça n’avancera à rien, de faire du bruit… Alors, tu viens me chercher ?

— Oui, tu vas me suivre et tout de suite… Je suis ton mari, le seul bon ! Oh ! je connais mon droit… N’est-ce pas, Berru, que c’est mon droit ?… Allons, mets un bonnet, sois gentille, si tu ne veux pas que tout le monde connaisse nos affaires.

Elle le regardait, et malgré elle son visage bouleversé disait qu’elle ne l’aimait plus, qu’il l’effrayait et la dégoûtait, avec sa vieillesse affreuse de misérable. Quoi ! elle si blanche, si dodue, accoutumée maintenant à toutes les douceurs bourgeoises, recommencerait sa vie rude et pauvre d’autrefois, en compagnie de cet homme qui lui semblait un spectre !

— Tu refuses, reprit Damour qui lisait sur son visage. Oh ! je comprends, tu es habituée à faire la dame dans un comptoir ; et moi, je n’ai pas de belle boutique, ni de tiroir plein de monnaie, où tu puisses tripoter à ton aise… Puis, il y a les petits de tout à l’heure, que tu m’as l’air de mieux garder que Louise. Quand on a perdu la fille, on se fiche bien du père !… Mais tout ça m’est égal. Je veux que tu viennes, et tu viendras, ou bien