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JACQUES DAMOUR



I


Là-bas, à Nouméa, lorsque Jacques Damour regardait l’horizon vide de la mer, il croyait y voir parfois toute son histoire, les misères du siège, les colères de la Commune, puis cet arrachement qui l’avait jeté si loin, meurtri et comme assommé. Ce n’était pas une vision nette des souvenirs où il se plaisait et s’attendrissait, mais la sourde rumination d’une intelligence obscurcie, qui revenait d’elle-même à certains faits restés debout et précis, dans l’écroulement du reste.

À vingt-six ans, Jacques avait épousé Félicie, une grande belle fille de dix-huit ans, la nièce d’une fruitière de la Villette, qui lui louait une chambre.

Lui, était ciseleur sur métaux et gagnait jusqu’à des douze francs par jour ; elle,