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y avait aussi des métayers, race complètement distincte, qui portaient la courte veste de drap et le large chapeau rond. Mais Estelle fut surtout ravie par le costume riche d’une jeune fille. La coiffe la serrait aux tempes et se terminait en pointe. Sur son corset rouge, garni de larges manches à revers, s’appliquait un plastron de soie broché de fleurs voyantes. Et une ceinture, aux broderies d’or et d’argent, serrait ses trois jupes de drap bleu superposées, plissées à plis serrés ; tandis qu’un long tablier de soie orange descendait, en laissant à découvert ses bas de laine rouge et ses pieds chaussés de petites mules jaunes.

— S’il est permis ! dit M. Chabre, qui venait de se planter derrière sa femme. Il faut être en Bretagne pour voir un pareil carnaval.

Estelle ne répondit pas. Un grand jeune homme, d’une vingtaine d’années, sortait de l’église, en donnant le bras à une vieille dame. Il était très blanc de peau, la mine fière, les cheveux d’un blond fauve. On aurait dit un géant, aux épaules larges, aux membres déjà bossués de muscles, et si tendre, si délicat pourtant, qu’il avait la figure rose d’une jeune fille, sans un poil aux joues. Comme Estelle le regardait fixement, surprise de sa grande beauté, il tourna