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siennes en restaient hermétiquement closes. Las et énervé de cette promenade prolongée, j’ai fini par aller m’asseoir sous le berceau de volubilis. Ce matin-là, le temps était couvert, le soleil ne glissait pas en poussière d’or entre les feuilles. Il faisait presque nuit, dans ces verdures. Je réfléchissais, je me disais que je devais jouer le tout pour le tout. Ma conviction était que, si j’hésitais de nouveau, Louise ne serait jamais à moi. Je m’encourageais, j’évoquais ce qui me l’avait fait juger complaisante et facile. Mon plan était simple, et je le mûrissais : dès que je me trouverais seul avec elle, je lui prendrais les mains, j’affecterais d’être troublé, afin de ne pas trop l’effaroucher d’abord ; puis, je lui baiserais le cou, et le reste allait tout seul. Pour la dixième fois, je perfectionnais mon plan, lorsque tout d’un coup Louise a paru.

— Où vous cachez-vous donc ? disait-elle gaiement, en me cherchant dans l’obscurité. Ah ! vous êtes là ! Il y a dix minutes que je cours après vous… Je vous demande pardon de vous avoir fait attendre.

Je lui ai répondu, la gorge un peu serrée, que l’attente n’avait rien d’ennuyeux, lorsqu’on songeait à elle.