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— Voilà la récompense, quand on se lève matin, disait Louise gaiement.

Puis, elle s’est assise sous le berceau, et je me suis permis de me mettre près d’elle, en voyant qu’elle reculait sa jupe pour me faire une petite place. J’étais très ému, parce qu’il me venait la pensée de brusquer les choses, en la prenant à la taille et en la baisant sur le cou. Je sentais bien que c’était là une brutalité de sous-lieutenant forçant la vertu d’une chambrière. Mais je ne trouvais rien autre chose, et cette idée m’obsédait, tournait à une sorte de besoin physique. Je ne sais si Louise a compris ce qui se passait en moi : elle ne s’est pas levée ; seulement, elle a pris un air grave.

— D’abord, causons de nos affaires, voulez-vous ? m’a-t-elle dit.

Mes oreilles bourdonnaient, je me suis efforcé de l’écouter. Il faisait sombre et un peu froid, sous le berceau. Le soleil trouait le feuillage des volubilis de minces fusées d’or ; et, sur le peignoir blanc de Louise, c’était comme des mouches d’or, des insectes d’or qui se posaient.

— Où en sommes-nous ? m’a-t-elle demandé, d’un air de complice.

Alors, je lui ai raconté l’étrange revirement