Page:Zola - Naïs Micoulin, 1884.djvu/233

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

J’ai rougi une seconde fois. J’étais sur le point de risquer ma déclaration, de crier : « Je refuse, parce que je vous aime. » Mais elle a eu un geste, comme si elle comprenait et qu’elle voulût me faire taire. Puis, elle a ajouté, en riant :

— Si vous êtes fier, si vous tenez à rendre service pour service, nous acceptons bien volontiers votre protection, là-bas. Vous savez qu’il y a un conseiller général à nommer. Mon mari se porte, mais il craint d’être battu, ce qui serait très désagréable dans sa situation… Voulez-vous nous aider ?

On ne pouvait être plus charmante. Cette histoire d’élection m’a paru un prétexte de femme spirituelle, pour nous retrouver aux champs.

— Mais sans doute je vous aiderai ! ai-je répondu avec gaieté.

— Et si vous faites nommer mon mari, il est entendu que mon mari vous donne à son tour un coup d’épaule ?

— Marché conclu.

— Oui, marché conclu.

Elle m’a tendu sa petite main, et j’ai tapé dedans. Nous plaisantions tous les deux. Cela me semblait ravissant, en vérité. Les arbres avaient cessé, le soleil tombait d’aplomb en haut de la