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la parole, et il n’a pas même paru : on racontait qu’il s’était trouvé retenu dans je ne sais quelle commission du Sénat. En revanche, comme je m’asseyais au fond d’une tribune, j’ai éprouvé une émotion, en apercevant madame Gaucheraud au premier rang de la tribune d’en face. Elle m’a vu, elle m’a regardé en souriant. Hélas ! Louise n’était pas avec elle. Ma joie est tombée. À la sortie je me suis arrangé pour rencontrer madame Gaucheraud dans un couloir. Elle s’est montrée familière. Félix, certainement, lui a parlé de moi.

— Est-ce que vous vous êtes absenté de Paris ? m’a-t-elle demandé.

Je suis resté muet, révolté de cette question. Moi qui battais si furieusement la ville !

— C’est qu’on ne vous rencontre nulle part. La dernière réception, au ministère, a été superbe, et il y a eu une exposition hippique merveilleuse…

Puis, devant mon air désespéré, elle s’est mise à rire.

— Allons, à demain, a-t-elle repris en s’éloignant. On vous verra là-bas, n’est-ce pas ?

J’ai répondu oui, stupide, n’osant risquer une question, de peur de l’entendre rire de nouveau.