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en avant avec ces dames. Je saisissais des lambeaux de conversation.

— Alors, vous allez ce soir aux Variétés ?

— Oui, j’ai loué une baignoire. On dit cette pièce drôle… Je vous emmène, Louise. Oh ! je le veux !

Et plus loin :

— Voilà la saison finie. Cette ouverture du Salon est la dernière solennité parisienne.

— Vous oubliez les courses.

— Tiens ! j’ai envie d’aller aux courses de Maisons-Laffitte. On m’a dit que c’est très gentil.

Pendant ce temps, Gaucheraud me parlait du Boquet, une propriété superbe, disait-il, et dont mon père avait doublé la valeur. Je le sentais plein de flatteries. Mais je ne l’écoutais guère, remué jusqu’au fond de mon être, chaque fois qu’en s’arrêtant brusquement devant un tableau, Louise m’effleurait de sa longue traîne. Son cou blanc, sous ses cheveux noirs, était délicat comme celui d’une enfant. D’ailleurs, elle gardait son allure garçonnière, ce qui me fâchait un peu. On la saluait beaucoup, et elle riait, et elle occupait les gens par les éclats de sa gaieté et les courses vives de ses jupes. Deux ou trois fois, elle s’était retournée pour me regarder fixement. Je mar-