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— Et la dame blonde ? ai-je demandé brusquement.

— La dame blonde, a répondu Félix sans se troubler, c’est madame Gaucheraud.

— Elle est honnête, celle-là ?

— Mais sans doute elle est honnête.

Il avait pris un air grave, qu’il n’a pu garder ; son sourire a reparu, j’ai même cru lire sur son visage un air de fatuité qui m’a fâché. Les deux femmes s’étaient sans doute aperçues que nous nous occupions d’elles, car elles forçaient leurs rires. Je suis resté seul, une dame ayant emmené Félix ; et j’ai passé la soirée à les comparer l’une à l’autre, blessé et attiré, ne comprenant pas bien, éprouvant cette anxiété d’un homme qui a peur de commettre quelque sottise, en se risquant dans un monde qu’il ne connaît point encore.

— Il est assommant, il ne vient pas, m’a dit ma tante, lorsqu’elle m’a retrouvé dans le même coin de porte. C’est toujours comme ça, d’ailleurs… Enfin, il est minuit à peine, sa femme l’attend encore.

J’ai fait le tour par la salle à manger, je suis allé me planter à l’autre porte du salon. De cette manière, je me trouvais derrière ces dames. Comme j’arrivais, j’ai entendu Berthe qui appelait