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perdu. Tout d’un coup, je me mis à crier, à hurler. Cela était plus fort que moi, les hurlements sortaient de ma gorge qui se dégonflait. J’appelai au secours d’une voix que je ne me connaissais pas, m’affolant davantage à chaque nouvel appel, criant que je ne voulais pas mourir. Et j’égratignais le bois avec mes ongles, je me tordais dans les convulsions d’un loup enfermé. Combien de temps dura cette crise ? je l’ignore, mais je sens encore l’implacable dureté du cercueil où je me débattais, j’entends encore la tempête de cris et de sanglots dont j’emplissais ces quatre planches. Dans une dernière lueur de raison, j’aurais voulu me retenir et je ne pouvais pas.

Un grand accablement suivit. J’attendais la mort, au milieu d’une somnolence douloureuse. Ce cercueil était de pierre ; jamais je ne parviendrais à le fendre ; et cette certitude de ma défaite me laissait inerte, sans courage pour tenter un nouvel effort. Une autre souffrance, la faim, s’était jointe au froid et à l’asphyxie. Je défaillais. Bientôt ce supplice fut intolérable. Avec mon doigt, je tâchai d’attirer des pincées de terre, par le nœud que j’avais enfoncé, et je mangeai cette terre, ce qui redoubla mon tourment. Je mordais mes bras, n’osant aller jusqu’au sang, tenté