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là ? Mon rêve recommençait, je n’avais pas encore le cerveau bien solide, je mêlais l’imagination du puits d’air et de sa tache de ciel, avec la réalité de la fosse où je suffoquais. Les yeux démesurément ouverts, je regardais les ténèbres. Peut-être apercevrais-je un trou, une fente, une goutte de lumière ! Mais des étincelles de feu passaient seules dans la nuit, des clartés rouges s’élargissaient et s’évanouissaient. Rien, un gouffre noir, insondable. Puis, la lucidité me revenait, j’écartais ce cauchemar imbécile. Il me fallait toute ma tête, si je voulais tenter le salut.

D’abord, le grand danger me parut être dans l’étouffement qui augmentait. Sans doute, j’avais pu rester si longtemps privé d’air, grâce à la syncope qui suspendait en moi les fonctions de l’existence ; mais, maintenant que mon cœur battait, que mes poumons soufflaient, j’allais mourir d’asphyxie, si je ne me dégageais au plus tôt. Je souffrais également du froid, et je craignais de me laisser envahir par cet engourdissement mortel des hommes qui tombent dans la neige, pour ne plus se relever.

Tout en me répétant qu’il me fallait du calme, je sentais des bouffées de folie monter à mon crâne. Alors, je m’exhortais, essayant de me