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votre épaule. Mais, cette fois, ce dont je souffrais surtout, c’était du froid et du manque d’air. Jamais je n’avais eu si froid ; un manteau de neige me tombait sur les épaules, une humidité lourde pleuvait sur mon crâne. Et j’étouffais avec cela, il me semblait que la voûte de rocher croulait sur ma poitrine, que toute la montagne pesait et m’écrasait. Cependant, un cri de délivrance avait retenti. Depuis longtemps, nous nous imaginions entendre au loin un bruit sourd, et nous nous bercions de l’espoir qu’on travaillait près de nous. Le salut n’arrivait point de là pourtant. Un de nous venait de découvrir un puits dans le tunnel ; et nous courions tous, nous allions voir ce puits d’air, en haut duquel on apercevait une tache bleue, grande comme un pain à cacheter. Oh ! quelle joie, cette tache bleue ! C’était le ciel, nous nous grandissions vers elle pour respirer, nous distinguions nettement des points noirs qui s’agitaient, sans doute des ouvriers en train d’établir un treuil, afin d’opérer notre sauvetage. Une clameur furieuse : « Sauvés ! sauvés ! » sortait de toutes les bouches, tandis que des bras tremblants se levaient vers la petite tache d’un bleu pâle.

Ce fut la violence de cette clameur qui m’é-