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mer sa liberté, elle était capable de s’afficher avec M. des Fondettes. Il affectait donc de ne point s’occuper d’elle, tout en agonisant d’angoisse à ses moindres absences. S’il n’avait pas craint le ridicule, il l’aurait suivie lui-même dans les rues. Ce fut alors qu’il voulut avoir près d’elle une personne dont il achèterait le dévouement.

On avait conservé mademoiselle Chuin dans la maison. Le baron était habitué à elle. D’autre part, elle savait trop de choses pour qu’on pût s’en débarrasser. Un moment, la vieille fille avait eu le projet de se retirer avec les vingt mille francs que Nantas lui avait comptés, au lendemain de son mariage. Mais sans doute elle s’était dit que la maison devenait bonne pour y pêcher en eau trouble. Elle attendait donc une nouvelle occasion, ayant fait le calcul qu’il lui fallait encore une vingtaine de mille francs, si elle voulait acheter à Roinville, son pays, la maison du notaire, qui avait fait l’admiration de sa jeunesse.

Nantas n’avait pas à se gêner avec cette vieille fille, dont les mines confites en dévotion ne pouvaient plus le tromper. Pourtant, le matin où il la fit venir dans son cabinet et où il lui proposa nettement de le tenir au courant des moindres