Page:Zola - Madeleine Férat, 1869.djvu/141

Cette page a été validée par deux contributeurs.

VII

Vers le milieu de janvier, Guillaume dut se rendre à Mantes. Une affaire d’intérêt dont ils n’avaient pu confier le soin à personne, devait l’y retenir toute la soirée. Il partit en cabriolet, et dit à Madeleine qu’il rentrerait vers les onze heures. La jeune femme l’attendit en compagnie de Geneviève.

Après le dîner, quand la table fut desservie, la protestante étala sa grande Bible, comme d’habitude. Elle lut çà et là les pages qui lui tombèrent sous les yeux. Vers la fin de la soirée, le livre s’ouvrit à ce touchant poème de la pécheresse versant des parfums sur les pieds de Jésus, qui lui pardonne ses péchés et lui dit d’aller en paix. La fanatique choisissait rarement un passage du Nouveau Testament ; ces récits de rédemption, ces paraboles d’une poésie tendre et exquise ne contentaient pas les ardeurs sombres de son esprit. Ce soir-là, soit qu’elle obéît au hasard qui avait ouvert la Bible à un passage de miséricorde, soit qu’elle fût émue par une pensée vague et inconsciente, elle psalmodia l’histoire de Marie Madeleine d’une voix recueillie, presque douce.

Elle murmurait dans le silence de la salle : « Et une femme de la ville, qui avait été de mauvaise vie, ayant su