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Alors, Ferdinand restait honteux pendant une semaine. Cela, jusque dans le vieil âge, rallumait la flamme de leur amour. Adèle adorait toujours son mari, avec cette jalousie contenue qu’elle n’avait jamais laissé éclater devant lui ; et lui, lorsqu’il la voyait dans un de ces silences terribles, après le renvoi d’une bonne, il tâchait d’obtenir son pardon par toutes sortes de soumissions tendres. Elle le possédait alors comme un enfant. Il était très ravagé, le teint jauni, le visage creusé de rides profondes ; mais il avait gardé sa barbe d’or, qui pâlissait sans blanchir, et qui le faisait ressembler à quelque dieu vieilli, doré encore du charme de sa jeunesse.

Un jour vint où il eut, dans leur atelier de Mercœur, le dégoût de la peinture. C’était comme une répugnance physique ; l’odeur de l’essence, la sensation grasse du pinceau sur la toile lui causaient une exaspération nerveuse ; ses mains se mettaient à trembler, il avait des vertiges. Sans doute il y avait là une conséquence de son impuissance elle-même, un résultat du long détraquement de ses facultés d’artiste, arrivé à la période aiguë. Il devait finir par cette impossibilité matérielle. Adèle se montra très bonne, le réconfortant, lui jurant que c’était une mauvaise disposition passagère dont il guérirait ; et elle le força à se reposer. Comme il ne travaillait absolument plus aux tableaux, il s’inquiéta, devint sombre. Mais elle trouva un arrangement : ce serait lui qui ferait