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déjà, et elle revenait simplement chercher sa jeunesse, cette vie glacée dont elle avait dormi.

À cette heure, le nom de Ferdinand Sourdis ne pouvait plus grandir. Le peintre, à cinquante ans, avait obtenu toutes les récompenses et toutes les dignités, les médailles réglementaires, les croix et les titres. Il était commandeur de la Légion d’honneur, il faisait partie de l’Institut depuis plusieurs années. Sa fortune seule s’élargissait encore, car les journaux avaient épuisé les éloges. Il y avait des formules toutes faites qui servaient couramment pour le louer : on l’appelait le maître fécond, le charmeur exquis auquel toutes les âmes appartenaient. Mais cela ne semblait plus le toucher, il devenait indifférent, portant sa gloire comme un vieil habit auquel il était habitué. Lorsque les gens de Mercœur le voyaient passer, voûté déjà, avec ses regards vagues qui ne se fixaient sur rien, il entrait beaucoup de surprise dans leur respect, car ils s’imaginaient difficilement que ce monsieur, si tranquille et si las, pût faire tant de bruit dans la capitale.

D’ailleurs, tout le monde à présent savait que Mme Sourdis aidait son mari dans sa peinture. Elle passait pour une maîtresse femme, bien qu’elle fût petite et très grosse. C’était même un autre étonnement, dans le pays, qu’une dame si corpulente pût piétiner devant des tableaux