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Mais celui-ci, à ce qu’on lui raconta, appartenait à une grande famille ruinée ; et il avait dû, à la mort de ses parents, accepter une situation quelconque, pour ne pas mourir de faim. Il continuait ses études de peinture, il rêvait d’être libre, d’aller à Paris, de tenter la gloire. Une année se passa. Ferdinand semblait s’être résigné, cloué à Mercœur par la nécessité du pain quotidien. Le père Morand avait fini par le mettre dans ses habitudes, et il ne s’intéressait plus autrement à lui.

Un soir, cependant, une question de sa fille lui causa un étonnement. Elle dessinait sous la lampe, s’appliquant à reproduire avec une exactitude mathématique une photographie d’après un Raphaël, lorsque, sans lever la tête, elle dit, après un long silence :

« Papa, pourquoi ne demandes-tu pas une de ses toiles à M. Sourdis ?… On la mettrait dans la vitrine.

— Tiens ! c’est vrai, s’écria Morand. C’est une idée… Je n’ai jamais songé à voir ce qu’il faisait. Est-ce qu’il t’a montré quelque chose ?

— Non, répondit-elle. Je dis ça en l’air… Nous verrons au moins la couleur de sa peinture. »

Ferdinand avait fini par préoccuper Adèle. Il la frappait vivement par sa beauté de jeune blond, les cheveux coupés ras, mais la barbe longue, une barbe d’or, fine et légère, qui laissait voir sa peau rose. Ses yeux bleus avaient une