I
Tous les samedis, régulièrement, Ferdinand Sourdis venait renouveler sa provision de couleurs et de pinceaux dans la boutique du père Morand, un rez-de-chaussée noir et humide, qui dormait sur une étroite place de Mercœur, à l’ombre d’un ancien couvent transformé en collège communal. Ferdinand, qui arrivait de Lille, disait-on, et qui depuis un an était « pion » au collège, s’occupait de peinture avec passion, s’enfermant, donnant toutes ses heures libres à des études qu’il ne montrait pas.
Le plus souvent, il tombait sur Mlle Adèle, la fille du père Morand, qui peignait elle-même de fines aquarelles, dont on parlait beaucoup à Mercœur. Il faisait sa commande.
« Trois tubes de blanc, je vous prie, un d’ocre jaune, deux de vert Véronèse. »
Adèle, très au courant du petit commerce de