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sa place dans la seconde antichambre, où il se tenait d’habitude.

Pierre n’aima point ce visage de vieille dévote, blêmi par le célibat, ravagé par des pratiques trop rudes ; et, comme don Vigilio ne s’était pas remis au travail, la tête lasse, les mains brûlées de fièvre, il se hasarda à le questionner. Oh ! l’abbé Paparelli, un homme de la foi la plus vive, qui restait par simple humilité dans un poste modeste, près de Son Éminence ! D’ailleurs, celle-ci voulait bien l’en récompenser, en ne dédaignant pas, parfois, d’écouter ses avis. Et il y avait, dans les yeux ardents de don Vigilio, une sourde ironie, une colère voilée encore, tandis qu’il continuait à examiner Pierre, l’air rassuré un peu, gagné par l’évidente droiture de cet étranger, qui ne devait faire partie d’aucune bande. Aussi finissait-il par se départir de sa continue et maladive méfiance. Il s’abandonna jusqu’à causer un instant.

— Oui, oui, il y a parfois beaucoup de besogne, et assez dure… Son Éminence appartient à plusieurs congrégations, le Saint-Office, l’Index, les Rites, la Consistoriale. Et, pour l’expédition des affaires qui lui incombent, c’est entre mes mains que tous les dossiers arrivent. Il faut que j’étudie chaque affaire, que je fasse un rapport, enfin que je débrouille la besogne… Sans compter que toute la correspondance, d’autre part, me passe par les mains. Heureusement, Son Éminence est un saint, qui n’intrigue ni pour lui ni pour les autres, ce qui nous permet de vivre un peu à l’écart.

Pierre s’intéressait vivement à ces détails intimes d’une de ces existences de prince de l’Église, si cachées d’ordinaire, déformées souvent par la légende. Il sut que le cardinal, hiver comme été, se levait à six heures du matin. Il disait sa messe dans sa chapelle, une petite pièce, meublée seulement d’un autel en bois peint, et où personne n’entrait jamais. D’ailleurs, son appartement particulier ne se composait que d’une chambre à coucher,