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elle lui rendait cette justice qu’il avait de rares mérites et une piété tout à fait exemplaire.

Cependant, Benedetta continuait à rire et à plaisanter. Et, comme Victorine était sortie de la salle, elle appela le valet.

— Écoutez, Giacomo, vous allez me faire une petite commission…

Elle s’interrompit, pour dire à sa tante et à Pierre :

— Je vous en prie, faisons valoir nos droits… Moi je les vois à table, en bas, presque au-dessous de nous. Ils doivent, comme nous, en être au dessert. Mon oncle soulève les feuilles, se sert avec un bon sourire, passe le panier à Dario, qui le passe à don Vigilio. Et, tous les trois, ils mangent avec componction… Les voyez-vous ? Les voyez-vous ?

Elle les voyait, elle, et c’était son besoin d’être près de Dario, sa continuelle pensée volant vers lui, qui l’évoquait ainsi, avec les deux autres. Son cœur était en bas, elle voyait, elle entendait, elle sentait, par tous les sens exquis de son amour.

— Giacomo, vous allez descendre, vous allez dire à Son Éminence que nous mourons d’envie de goûter à ses figues et qu’elle serait bien aimable en nous envoyant celles dont elle ne voudra pas.

Mais donna Serafina, de nouveau, intervint, retrouvant sa voix sévère.

— Giacomo, je vous prie de ne pas bouger.

Et elle s’adressa à sa nièce :

— Allons, assez d’enfantillages !… J’ai l’horreur de ces sortes de gamineries.

— Oh ! ma tante, murmura Benedetta, je suis si heureuse, il y a si longtemps que je n’ai ri de si bon cœur !

Pierre, jusque-là, s’était contenté d’écouter, s’égayant simplement lui-même de la voir gaie à ce point. Comme il se produisait un petit froid, il parla alors, dit son propre étonnement d’avoir aperçu la veille, si tard en