Nani, pouvaient prendre une importance énorme, décisive.
— Ah ! si vous saviez, si vous saviez ! continua don Vigilio, il est partout, il a la main dans tout. Tenez ! pas une affaire ne s’est passée ici, chez les Boccanera, sans que je l’aie trouvé au fond, brouillant et débrouillant les fils, selon des nécessités que lui seul connaît.
Et, dans cette fièvre intarissable de confidences dont la crise le brûlait, il raconta comment monsignor Nani avait sûrement travaillé au divorce de Benedetta. Les Jésuites ont toujours eu, malgré leur esprit de conciliation, une attitude irréconciliable à l’égard de l’Italie, soit qu’ils ne désespèrent pas de reconquérir Rome, soit qu’ils attendent l’heure de traiter avec le vainqueur véritable. Aussi, familier de donna Serafina depuis longtemps, Nani avait-il aidé celle-ci à reprendre sa nièce, à précipiter la rupture avec Prada, dès que Benedetta eut perdu sa mère. C’était lui qui, pour évincer l’abbé Pisoni, ce curé patriote, le confesseur de la jeune fille, qu’on accusait d’avoir fait le mariage, avait poussé cette dernière à prendre le même directeur que sa tante, le père Jésuite Lorenza, un bel homme aux yeux clairs et bienveillants, dont le confessionnal était assiégé, à la chapelle du Collège Germanique. Et il semblait certain que cette manœuvre avait décidé de toute l’aventure, ce qu’un curé venait de faire pour l’Italie, un père allait le défaire contre l’Italie. Maintenant, pourquoi Nani, après avoir consommé la rupture, paraissait-il s’être désintéressé un moment, jusqu’au point de laisser péricliter la demande en annulation de mariage ? et pourquoi, désormais, s’en occupait-il de nouveau, faisant acheter monsignor Palma, mettant donna Serafina en campagne, pesant lui-même sur les cardinaux de la congrégation du Concile ? Il y avait là des points obscurs, comme dans toutes les affaires dont il s’occupait ; car il était surtout l’homme des combinaisons à longue portée. Mais on