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avec lui, pour que la religion de tout le monde soit respectée.

Intéressé vivement, Pierre écoutait. Il se risqua à poser une question.

— Et y a-t-il beaucoup de socialistes, à Rome, parmi le peuple ?

Cette fois, la réponse se fit attendre davantage encore.

— Des socialistes, monsieur l’abbé, oui, sans doute, quelques-uns, mais bien moins nombreux que dans d’autres villes… Ce sont des nouveautés, où vont les impatients, sans y entendre grand'chose peut-être… Nous, les vieux, nous étions pour la liberté, nous ne sommes pas pour l’incendie ni pour le massacre.

Et il craignit d’en dire trop, devant cette dame et ces messieurs, il se mit à geindre en s’allongeant sur sa paillasse, pendant que la contessina prenait congé, un peu incommodée par l’odeur, après avoir averti le prêtre qu’il était préférable de remettre leur aumône à la femme, en bas.

Déjà, Tommaso avait repris sa place devant la table, le menton entre les mains, tout en saluant ses hôtes, sans plus s’émotionner à leur sortie qu’à leur entrée.

— Bien au revoir, et très heureux d’avoir pu vous être agréable.

Mais, sur le seuil, l’enthousiasme de Narcisse éclata. Il se retourna, pour admirer encore la tête du vieil Ambrogio.

— Oh ! mon cher abbé, quel chef-d’œuvre ! La voilà la merveille, la voilà la beauté ! Combien cela est moins banal que le visage de cette fille !… Ici, je suis certain que le piège du sexe ne m’induit pas en une tentation malpropre. Je ne m’émeus pas pour des raisons basses… Et puis, franchement, quel infini dans ces rides, quel inconnu au fond des yeux noyés, quel mystère parmi le hérissement de la barbe et des cheveux ! On rêve un prophète, un Dieu le Père !

En bas, Giacinta était encore assise sur la caisse à demi