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unité, agissait follement, courait à la ruine, à la banqueroute peut-être. Cette Rome qui avait toujours été pour lui la capitale nécessaire, la ville de gloire sans pareille qu’il fallait au peuple roi de demain, semblait se refuser à ce rôle d’une grande capitale moderne, lourde comme une morte, pesant du poids des siècles sur la poitrine de la jeune nation. Et il y avait encore son fils, son Luigi, qui le désolait, rebelle à toute direction, devenu un des enfants décorateurs de la conquête, se ruant à la curée chaude de cette Italie, de cette Rome, que son père semblait avoir uniquement voulues pour que lui-même les pillât et s’en engraissât. Vainement, il s’était opposé à ce qu’il quittât le ministère, à ce qu’il se jetât dans l’agio effréné sur les terrains et les immeubles, que déterminait le coup de démence des quartiers neufs. Il l’adorait quand même, il était réduit au silence, surtout maintenant que les opérations financières les plus hasardeuses lui avaient réussi comme cette transformation de la villa Montefiori en une véritable ville, affaire colossale où les plus riches s’étaient ruinés, dont lui s’était retiré avec des millions. Et Orlando, désespéré et muet, dans le petit palais que Luigi Prada avait fait bâtir, rue du Vingt-Septembre, s’était entêté à n’y occuper qu’une chambre étroite, où il achevait ses jours cloîtré, avec un seul serviteur, n’acceptant rien autre de son fils que cette hospitalité, vivant pauvrement de son humble rente.

Comme il arrivait à cette rue neuve du Vingt-Septembre, ouverte sur le flanc et sur le sommet du Viminal, Pierre fut frappé de la somptuosité lourde des nouveaux palais, où s’accusait le goût héréditaire de l’énorme. Dans le chaud après-midi de vieil or pourpré, cette rue large et triomphale, ces deux files de façades interminables et blanches disaient le fier espoir d’avenir de la nouvelle Rome, le désir de souveraineté qui avait fait pousser du sol ces bâtisses colossales. Mais surtout il demeura béant devant le Ministère des Finances, un amas gigantesque,