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avoué à la papauté, il s’usait par son continuel effort, trempant dans trop de choses, remuant trop de monde.

Mais Pierre n’avait vu en lui que le préfet de la congrégation de l’Index ; et une idée seule l’émotionnait, celle que cet homme allait décider du sort de son livre. Aussi, lorsque le cardinal eut disparu et que l’abbé Paparelli fut retourné dans la deuxième antichambre, ne put-il s’empêcher de demander à don Vigilio :

— Leurs Éminences le cardinal Sanguinetti et le cardinal Boccanera sont donc très liées ?

Un sourire pinça les lèvres du secrétaire, pendant que ses yeux flambaient d’une ironie dont il n’était plus maître.

— Oh ! très liées, non, non !… Elles se voient, quand elles ne peuvent pas faire autrement.

Et il expliqua qu’on avait des égards pour la haute naissance du cardinal Boccanera, de sorte qu’on se réunissait volontiers chez lui, lorsqu’une affaire grave se présentait, comme ce jour-là précisément, nécessitant une entrevue, en dehors des séances habituelles. Le cardinal Sanguinetti était le fils d’un petit médecin de Viterbe.

— Non, non ! Leurs Éminences ne sont pas liées du tout… Quand on n’a ni les mêmes idées, ni le même caractère, il est bien difficile de s’entendre. Et surtout quand on se gêne !

Il avait dit cela plus bas, comme à lui-même, avec son sourire mince. D’ailleurs, Pierre écoutait à peine, tout à sa préoccupation personnelle.

— Peut-être bien est-ce pour une affaire de l’Index qu’ils sont réunis ? demanda-t-il.

Don Vigilio devait savoir le motif de la réunion. Mais il se contenta de répondre que, pour une affaire de l’Index, la réunion aurait eu lieu chez le préfet de la congrégation. Et Pierre, cédant à son impatience, en fut réduit à lui poser une question directe.