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devinèrent, levèrent la tête en même temps. Et ils eurent le même cri, un élan commun et unique les souleva, les jeta à son cou.

— Le père !

Lui, heureux, les embrassa, d’une solide étreinte. Ce fut tout, il n’y eut ni attendrissement prolongé, ni paroles inutiles. Il semblait être sorti de la veille, revenir après une course qui l’aurait attardé. Il les regardait, avec son sourire, tandis qu’eux trois, les regards dans les siens, souriaient aussi ; et cela disait toute l’affection, le don total, à jamais.

— Entre donc, Pierre. Serre-moi la main de ces gaillards.

Le prêtre, gêné, pris d’un singulier malaise, était resté près de la porte. Ses trois neveux lui donnèrent de vigoureuses poignées de main. Puis, ne sachant que faire, se trouvant dépaysé, il finit par s’asseoir à l’écart, devant le vitrage.

— Eh bien ! mes petits, et Mère-Grand, et Marie ?

La grand’mère venait de monter à sa chambre. Quant à la jeune fille, elle avait eu l’idée d’aller elle-même au marché. C’était une de ses joies, elle prétendait qu’elle seule savait acheter des œufs frais et du beurre qui sentait la noisette. Puis, elle rapportait parfois une gourmandise ou des fleurs, ravie de se montrer si bonne ménagère.

— Alors, tout va bien ? reprit Guillaume. Vous êtes contents, le travail marche ?

Et il questionna chacun d’un mot, en homme qui rentre tout de suite dans ses habitudes quotidiennes. Thomas, dont la rude et bonne figure s’épanouissait, résuma en deux phrases ses recherches nouvelles pour le petit moteur, certain maintenant, disait-il, d’avoir trouvé. François, enfoncé toujours dans la préparation de son examen, plaisanta, parla de l’énorme matière qu’il avait encore à